Tout le monde souffre de problèmes de dos, à se demander si ce n’est pas une fatalité ! Au fil du temps, nos corps sont soumis à des tensions quotidiennes. Résultat, douleurs chroniques, dorsales, cervicales, lombaires ou articulaires s’installent. Mais pas que ! Le mental aussi en prend un coup !

Et si la méthode Alexander pouvait nous aider à améliorer notre tonus postural, notre coordination, notre équilibre et nous permettre de mieux gérer notre stress ?

Vous allez me dire qu’avec des « si » on mettrait Paris en bouteille. Et bien, vous ne croyez pas si bien dire !

Laetitia Baudoin, enseignante de la méthode Alexander, nous en dit plus…

 

D’où vient la méthode Alexander ?

F.M. Alexander était un comédien Shakespearien australien qui avait de gros problèmes d’aphonie… Embêtant quand on monte sur scène ! Aucun médecin n’ayant réussi à diagnostiquer son problème, Alexander s’est longuement observé devant des miroirs et a pu constater qu’à chaque fois qu’il parlait, il faisait un léger mouvement de tête vers l’arrière et vers le bas. Cela venait entraver le bon fonctionnement de ses cordes vocales et de son larynx mais se répercutait aussi sur sa colonne en créant des tassements et des compressions. Au final, il a retrouvé sa voix et réglé ses problèmes de respiration. C’est comme ça qu’est née sa méthode.

Ça a dû lui prendre un temps fou avant de se rendre compte de tout ça ?

Au moins 10 ans ! (rires)

Ha oui… Il faut être patient donc !

Il était seul, c’était un gros travail d’observation ! Le plus fastidieux dans tout ça, c’est surtout de briser la force de l’habitude pour retrouver une bonne posture naturellement. Mais que ça ne vous décourage pas pour autant…

Justement, en quoi consiste une séance et à quel rythme ?

Il faut compter une vingtaine de séances entre 45 min et 1h au rythme d’une fois par semaine. Il y a tout d’abord, une importante partie consacrée à l’observation des mauvaises habitudes avec des mouvements simples comme se lever ou s’asseoir, par exemple. Le but étant de retrouver un fonctionnement optimal que l’on appliquera ensuite dans des situations concrètes en fonction de la personne et de sa profession. La séance se termine enfin, par une phase de repos actif.

Du repos actif ? Mais on n’est pas censé se détendre quand on se repose ?!

Il s’agit d’un moment important qui permet de relâcher les tensions tout en tonifiant les muscles profonds. C’est un gros travail mental. On utilise la pensée pour agir sur le corps.

Ce qui ne parle pas forcément à tout le monde…

Beaucoup ont du mal à porter leur attention sur le corps, cela demande de la présence. Une fin de séance qui se rapproche un peu de la méditation.

Combien coûte une séance ?

En moyenne 50 €. On ne va pas se mentir, il faut avoir le temps, l’envie et l’argent accessoirement… Mais les bénéfices sont tels que l’on peut s’éviter bien d’autres désagréments dans le futur qui pourraient être plus coûteux encore. On apprend ici un outil qui permet de devenir autonome. Le but c’est de réapprendre à utiliser son corps pour arrêter de se faire mal et de l’appliquer au quotidien.

 

 

Réputée en Australie, aux Etats-Unis mais aussi en Angleterre, en Allemagne ou en Suisse, l’Alexander reste méconnu en France, pourquoi ?

La méthode est même parfois remboursée par des complémentaires santé ! Ici on en est encore loin. La France est toujours un peu en retard de ce côté-là, les Français ont toujours besoin d’être rassurés scientifiquement par des études… Mais ça tombe bien, des études, on en a plein !

Sting, Madonna, ou encore Alkdous Huxley sont des adeptes de l’Alexander. En même temps, ils ont les moyens ; -) Pourquoi cette méthode rencontre-t-elle autant de succès auprès des artistes ?

C’est vrai que la méthode s’est avant tout fait connaître dans le milieu artistique. Acteurs, chanteurs, musiciens et même écrivains recherchent la performance. Utilisation du corps, projection de la voix, gestion du trac, mémorisation, créativité. Apprendre à relâcher les tensions et à se réaligner permet une meilleure spontanéité et une certaine liberté… Une technique qui s’enseigne beaucoup dans les conservatoires ou dans les écoles de théâtre.

Vous êtes vous-même une ancienne flûtiste professionnelle…

Les musiciens souffrent beaucoup de douleurs chroniques, de tendinites à répétition… Mais l’Alexander améliore aussi la sonorité et l’agilité des doigts ! Dès que le corps fonctionne mieux, il résonne mieux !

Une technique qui ne s’adresse pourtant pas exclusivement au milieu artistique ?

Non, elle s’adresse à tous ! Aujourd’hui, la méthode se développe à l’étranger jusque dans les hôpitaux et certains médecins (en Angleterre ou au Japon) se forment même à l’Alexander !

Pourquoi porte-t-on une attention particulière à la mobilité entre la tête, le cou et la colonne ?

Chez tous les vertébrés, c’est la tête qui guide le reste du corps, c’est physiologique. C’est ce qu’Alexander a nommé « le contrôle primaire ». Si cette relation entre la tête, le cou et la colonne est bonne, alors tout le corps fonctionne bien.

A l’instar de la naturopathie, l’Alexander considère le corps et l’esprit dans sa globalité. 2 facettes indissociables ?

En effet, ce n’est pas seulement un travail utile d’un point de vue physique, la technique permet aussi d’apprendre à mieux se connaître et à se libérer mentalement. Quand on libère des tensions musculaires, on envoie un message positif au cerveau pour lui dire « ça va bien ». Et vice et versa ! Encore une discipline qui relève du bon sens…

Pour quels motifs vous consulte-t-on le plus souvent ?

Lombalgies, cervicalgies mais aussi stress, burn out, trac, migraines, insomnies, bégaiements, phobies, amélioration de la posture… beaucoup de retraités me consultent pour « bien vieillir » !  Sans oublier les femmes enceintes. Au cours de la grossesse, la posture change très rapidement sur une courte période.

 

 

Je confirme ; -) Et dans le cadre d’une rééducation à la suite d’un accident ?

Aussi ! C’est d’ailleurs très complémentaire avec la Kiné !

On a du mal à imaginer qu’une rééducation corporelle puisse agir sur des problèmes aussi variés !

Lorsque la posture est bonne, elle agit positivement sur tout le fonctionnement corporel et ce, que ce soit musculaire, organique ou mental. Les poumons respirent bien, le cerveau est parfaitement irrigué… A l’origine, le corps est parfait, il a été conçu pour fonctionner merveilleusement. A nous de ne pas l’entraver avec des mauvaises habitudes.

C’est marrant mais plus je vous écoute et plus je me redresse ; -) J’ai d’ailleurs beaucoup de mal à rester assise sur une chaise !

C’est normal, c’est l’outil le plus anti naturel qui soit ! Une vraie contrainte ergonomique ! A la limite, il vaut mieux être assis sur les genoux plutôt que sur ses fesses pour éviter tout tassement et allonger la colonne. La position idéale étant celle des tribus indigènes ou africaines : accroupie !

 

 

Pas facile quand on conduit ou que l’on est en rdv donc ; -) En tant qu’enseignante, vous devez avoir envie de reprendre tout le monde, tout le temps… Déformation professionnelle !

Oui, c’est terrible ! J’observe énormément les gens mais je me retiens… Sur mon fils, par contre, j’utilise des moyens détournés parce que sinon ça le gonfle (rires).

Votre rôle consiste donc à nous apprendre à mieux nous tenir. Le problème c’est que certains se disent : « Je ne vais pas payer juste pour apprendre à m’asseoir et à marcher ! » Comment convaincre les plus réfractaires ?

Ben, je crois qu’on ne les convainc pas (rires) ! Il faut avoir envie de se prendre en main, ne pas attendre que le mal empire, en multipliant les prises de médicaments, les infiltrations etc… C’est un travail sur soi, un vrai travail de fond.

 

 

Pour finir, un conseil à donner à ceux qui nous lisent ?

A chaque fois que vous utilisez votre téléphone portable (ou une tablette), arrêtez-vous un instant pour observer votre posture. Vous risquez de vous surprendre courbé vers l’avant et vers le bas avec une grande tension dans le cou. Imaginez alors que votre tête, à l’image d’un ballon gonflé à l’hélium, s’étire vers le haut et se réaligne avec votre colonne. Rappelez-vous que ce n’est pas la tête qui va vers l’appareil mais l’appareil que l’on amène à soi.

 

 

Et puis, je terminerai par 2 images parlantes pour vous aider à mieux comprendre la méthode Alexander : 

  • Celle du jeune enfant de moins de 3 ans. Son corps est « tout neuf » sans tensions musculaires. Nous aussi, nous avons été comme ça mais au fil du temps et des mauvaises habitudes, nous avons entravé ce réflexe instinctif qui permet de se tenir parfaitement droit et sans effort.
  • Celle de la voiture que l’on dépose régulièrement au garage. Le garagiste sera content mais finira par se demander ce que vous faites avec pour avoir besoin de ses services aussi souvent. C’est sûr que si vous roulez avec le frein à main et en sur-régime, même avec la meilleure des voitures, vous altèrerez sa performance. Pour le corps, c’est la même chose. Apprenez donc à conduire votre corps, vous verrez, ça change la vie !

Pour en savoir plus : Site de Laetitia Baudoin www.tekalex.com

Site de l’APTA : https://www.techniquealexander.info/

Et enfin, un ouvrage complet qui vient tout juste de paraître :

 

 

« Quand la tête guide, le corps suit »

F.M. Alexander